Quand les défenseurs du loup 10/2017
Quand des défenseurs du loup et des éleveurs gardent les brebis
ensemble.
Grâce au programme associatif Pastoraloup, des "écovolontaires"
viennent aider les bergers à surveiller leur troupeau.
Le but : rétablir le dialogue entre pro et anti-loup.
Pour briser les tabous, des défenseurs du loup n'hésitent pas à garder
des brebis. C'est le cas de Pascal Gomes, un informaticien en congé
sabbatique. Dans la nuit tombante, l'homme s'applique à surveiller les
650 brebis dont il a la charge, dans un alpage des Alpes-de-Haute-
Provence. Son objectif : les protéger du loup mais aussi contribuer
à rétablir le dialogue entre "pro-" et "anti-".
"Mon intime conviction, c'est que même si on tuait tous les loups,
ils reviendraient", estime ce passionné de photo animale, qui prête
main forte à un berger en surveillant ses animaux la nuit depuis
10 jours, dans le cadre d'un programme mis en place par Férus,
une association de protection animale. Cette expérience permet
à Pascal d'apercevoir des loups. Il a vu à deux reprises "plusieurs
loups, un adulte et des jeunes". Il a même pris quelques clichés.
"La première fois, ça m'a fait chaud au cœur de les voir", glisse-t-il.
Ce "stage" est possible grâce au programme PastoraLoup de
l'association Férus. "Pendant une ou plusieurs semaines,
venez dormir auprès d'un troupeau de brebis, aider à la
surveillance de jour et aux tâches quotidiennes, participer à
un chantier de parc… et ainsi favoriser la cohabitation entre
les activités pastorales et les grands prédateurs en France",
écrit l'ONG sur son site web. Cette année, l'initiative a permis
de former une vingtaine de nouveaux bénévoles aux bases du
pastoralisme. Ils ont pu, comme Pascal, "voir des deux côtés,
celui du loup et celui des éleveurs".
Mais même si le recours à un de ces volontaires est une aide
précieuse, de nombreux éleveurs refusent de leur ouvrir leur
porte. Eric Vissouze, qui anime Pastoraloup, le déplore, mais le
comprend : "Férus c'est le diable pour eux, c'est comme faire
venir le loup dans la bergerie !". Roger Carreard a pour sa part
bien accueilli Pascal, qui le relaie chaque soir. Plusieurs des
brebis qu'il garde ont été tuées cet été, en plein jour, sous ses yeux.
"Je ne sais pas comment ça va finir mais y en a de plus en plus",
souffle le berger aux 17 ans d'expérience. Quand il mène son
troupeau, Roger ne quitte pas son fusil, à l'épaule sur une veste
camouflage. Le quinquagénaire sait qu'il n'a pas le droit de tirer
sur un loup, mais se dit qu'il pourrait "au moins l'effrayer" avec
son arme.
Les chiens de protection, les sirènes d'effarouchement, les
lumières autour des parcs de brebis la nuit, sont autant d'"aides",
mais Julien, également éleveur, ne voit qu'une solution :
"Surveiller son troupeau 24 heures sur 24, 365 jours par an".
Et pour cela, "heureusement qu'il y a les écovolontaires" de
Pastoraloup, reconnaît-il, alors qu'il a longtemps refusé l'aide
du programme de Férus, craignant des bénévoles "militants".
"En général, après avoir vu notre quotidien, la mentalité des
volontaires évolue, ils sont plus ouverts", remarque-t-il.
Une ouverture d'esprit qui se fait sans doute des deux côtés...
Mais le dialogue est encore loin d'être totalement établit : le
lundi 9 octobre 2017, une manifestation à Lyon contre le
Plan Loup doit réunir quelques 2.000 éleveurs. La Fédération
ovine estime, elle, qu'"il faut pouvoir tirer sur le loup quand
il attaque le troupeau", dit sa présidente, Michèle Boudoin.
Et cela en dehors de tout quota d'abattages fixé à 40 jusqu'à
fin juin 2018. "Il faut que le loup ait peur de l'homme", argue
Mme Boudoin, pour qui les attaques mettent "en danger la
ruralité dans plus de 33 départements". "Il faut qu'il apprenne
que lorsqu'il s'approche d'un troupeau, il est en danger de
mort", renchérit François Giaccobi, éleveur et chargé de ce
dossier pour la Chambre d'agriculture du département.
Et Michèle Boudoin de souhaiter un nouveau plan national
du loup qui "remette en son cœur l'élevage et les éleveurs".
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